Identité berrichonne

Publié le par nous-en-boischaut-sud

Dans le cadre de leur cycle de causeries et conférences estivales, les Thiaulins de Lignières recevaient le 25 juillet, Yolande Riou en leur château du Plaix.

Ainsi, Yolande Riou nous a présenté une conférence sur l’identité berrichonne, dans la continuité des études qu’elle a réalisées pour sa thèse remarquée en sociologie.

Identité berrichonne

Le premier point à mentionner pour parler du Berry est l’importance de l’histoire.

En effet, le Berry ce n’est ni un département ni une région, il n’a pas de frontières « naturelles » et est largement ouvert vers l’extérieur ; c’est « simplement» une ancienne province française qui est fortement ancrée dans l’histoire.

Donc si le Berry peut s’enorgueillir d’une histoire très ancienne (le territoire des Bituriges Cubi au 7ème siècle avant JC se retrouve assez bien dans les deux départements : Indre et Cher qui constituent aujourd’hui le Berry), la division du Berry en deux entités, comme aujourd’hui, est déjà présente dès le 12ème siècle avec la partition entre les seigneurs de Déols (liés à l’Aquitaine) et les Bourbons (appartenant au domaine royal), préfigurant la division actuelle entre Indre et Cher.

La fin du Moyen Age apparait comme l’âge d’or du Berry avec le roi de Bourges, la fondation de la 2ème université française à Bourges, Jacques Cœur en grand argentier… Le souvenir de cette époque attise le regret d’une grandeur qui n’existe plus mais il assure aussi, jusqu’à aujourd’hui, la prééminence de Bourges sur l’ensemble du Berry. Le complexe d’infériorité de l’Indre et, parallèlement, le complexe de supériorité du Cher trouvent peut-être là leurs racines.

La Révolution Française a acté cette séparation en deux départements.

Ces deux départements pourtant si semblables n’ont jamais réussi à collaborer ensemble malgré de nombreuses tentatives, issues en général de techniciens conscients de l’intérêt de mutualiser les moyens. La sphère politique a toujours opposé une inertie très forte à ces initiatives, pour des raisons jamais clairement explicitées et peut être pas très avouables, les laissant doucement mourir (Etats Généraux du Berry, Centripolis…). Peut-être que ce comportement explique en partie la forte défiance des habitants vis-à-vis de leurs responsables, traités d’apathiques.

Le seul secteur où la collaboration existe réellement et tend à se développer est celui du tourisme où les campagnes touristiques menées en commun sont des succès.

Entre réalité historique et déni politique, le Berry se maintient au niveau touristique et culturel ; il a un sens aux yeux de ses habitants et entretient toujours leur imaginaire.

Les images du Berry

Le Berry a une faible présence médiatique et, lorsque les chaines de télévision parlent du Berry, elles traitent surtout de faits ponctuels ou de l’atmosphère du Berry mais très peu d’économie. Auparavant, l’image qui était donnée du Berry était essentiellement passéiste et rétrograde (sorcellerie). Actuellement, cette image tend à se positiver, même si elle contient toujours des relents de caricature. Le summum de la caricature est atteint dans l’image du Berrichon présenté comme une entité homogène, au caractère renfermé, froid, passéiste. Ainsi il est toujours plus difficile de se présenter comme « Berrichon » que comme « étant du Berry ».

De façon surprenante, cette image négative est également propagée par des « leaders d’opinion », responsables politiques, syndicaux ou associatifs, qu’ils soient originaires ou non du Berry, alors que leur rôle serait plutôt de se poser en défenseur du territoire, peut-être veulent-ils mettre en relief leurs résultats mitigés en dénigrant le territoire autour.

C’est donc globalement une mauvaise image que reçoivent les personnes extérieures à la région. Par contre, l’interview de personnes extérieures à la région qui ont ensuite été amenées à s’installer en Berry, montre le plus souvent un fort contraste entre cette image négative et le ressenti, beaucoup plus positif, qu’ils en ont après leur installation.

De même, l’interview d’habitants du territoire donne dans un premier temps, un ressenti en accord avec l’image négative véhiculée par les média puis, interrogés sur leur propre expérience, ressortent des images beaucoup plus positives tenant à la qualité de vie.

Il existe donc une différence entre l’image du Berry reçue à l’extérieur, même si celle-ci s’améliore, et le ressenti de ceux qui y vivent. Le sentiment varie selon l’âge : alors que les jeunes ont plutôt un sentiment négatif lié au "pas grand-chose à faire", le sentiment s’inverse vers 30-40 ans où la qualité de vie prime sur l’animation du territoire.

En fait, les lieux de sociabilité officiels sont peu nombreux ce qui est fortement ressenti par les jeunes générations (pas grand-chose à faire), ils se retrouvent plutôt au sein de la sphère privée, chez les uns, chez les autres.

La vie associative, plus fournie qu’ailleurs, compense le manque de structures officielles et offre des activités culturelles nombreuses. La sociabilité repose plus sur un fonctionnement en réseau : tout le monde se connait, ce qui présente beaucoup d’avantages (solidarité, qualité de vie) mais aussi quelques inconvénients (manque d’intimité).

L’identité aujourd’hui

S’il existe bien une relation spécifique entre le Berry et ses habitants, donc une identité territoriale, il est plus difficile de la préciser. Celle-ci s’appuie sur des caractéristiques concrètes (paysages, produits du terroir, personnages célèbres) mais aussi sur des données immatérielles (ambiance, qualité de vie, nature préservée). Pour beaucoup, le cœur du Berry est la Vallée Noire avec George Sand comme personnage tutélaire. L’identité berrichonne repose sur un système de valeurs tournant autour de la ruralité et la qualité des relations humaines.

Le rural devient un espace chargé de valeurs positives et chacun recompose son Berry en choisissant ses propres valeurs (douceur, harmonie, calme, préservation du patrimoine…).

Yolande Riou a publié en 2013 un livre sur ce sujet : « L’identité berrichonne en question(s) » aux Editions L’Harmattan.

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F
Un compte-rendu encore une fois à la hauteur, merci. J'ai lu l'ouvrage de Yolande Riou, que j'ai trouvé particulièrement intéressant : son étude est rigoureuse et très fouillée. Espérons qu'elle contribuera au développement de notre belle région.
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