Le tissage à la gauloise

Publié le par nous-en-boischaut-sud

Marie-Pierre Puybarré est tisserande et archéologue expérimentale. Elle est venue à Châteaumeillant ce 28 mars à l'invitation du musée Emile Chénon. D'abord parce que le musée Emile Chénon s'intéresse beaucoup au tissage dans la protohistoire, il conserve une collection de pesons de métier à tisser et de fusaïoles provenant des fouilles de Médiolanum, mais aussi parce que, dans le cadre de l'opération « une classe, une œuvre », le musée va initier les enfants des maternelles au tissage.

Le tissage à la gauloiseLe tissage à la gauloise

Les fouilles archéologiques apportent de nombreux outils fusaïole, pesons… qui indiquent la présence d’une activité de tissage. Cependant, des échantillons de tissu sont plus rarement trouvés. Le tissu est un matériau périssable et nécessite des conditions très particulières pour être conservé.

Pour la tisserande, l'objectif de l’archéologie expérimentale est de recréer les liens manquants pour retrouver les techniques de tissage utilisées à l'époque. Elle s'appuie beaucoup sur l’ethnologie en observant les techniques utilisées par des peuples ayant gardé leurs méthodes ancestrales (pour le tissage, les techniques des lapons ont été beaucoup étudiées).

Le tissage à la gauloise

Le tissage, comme tous les artisanats, prend naissance avec la sédentarisation, vers 3500-2500 avant notre ère en Europe, mais des techniques d’étoffes cordées sont apparues bien avant (paléolithique) : ainsi le fourreau de la dague d'Ötzi retrouvé dans les glaces entre Italie et Autriche.

 

Les premières toiles retrouvées en Suisse, dans des cités lacustres, sont constituées de fibres végétales (lin, ortie, liber de différents bois) pour des raisons de conservation : elles se conservent bien en milieu acide. On a également retrouvé un rouleau de toile d’environ 10cm de largeur dont l’utilisation reste mystérieuse.

Le tissage à la gauloiseLe tissage à la gauloise

Les tissages peuvent être brochés pour réaliser un décor, ce sont des tissages très long à réaliser (3cm/h).

Plusieurs types de métiers à tisser sont utilisés : en Egypte ou en Syrie, on trouve des métiers horizontaux mais cela nécessite que le sol soit sec. En Europe, on utilise les métiers verticaux où les fils sont tendus par des pesons ; ils seront utilisés depuis Hallstatt jusqu’au 13ème siècle.

Le tissage à la gauloise

On trouve des traces de teinture sur les tissus depuis le néolithique. On note dans l'environnement des habitats néolithiques, des traces de plantes tinctoriales : garance (rouge), gaude, genêt, millepertuis (jaune), pastel (bleu) sureau (violet). Les teintures au murex (rouge) sont également connues mais le coût en est très élevé. Avant la teinture, le tissu « grand teint » subit un mordançage avec de l’alun (qui provient de Lipari), une décoction de plantes tinctoriales est réalisée avant teinture.

Période du bronze.

La source principale d’information pour cette période provient du Jutland (Danemark) où des sépultures ont été retrouvées dans un bon état de conservation.

Les tissus de laine ont bien été conservés. Les moutons de l’âge du bronze sont des descendants directs des mouflons ; leur laine, brune, est compacte et difficile à filer. La sépulture d’une jeune fille (18 ans) la montre habillée d’une tunique et d’une jupe en laine cordelée.

Le tissage à la gauloise

Des tissus essaient d’imiter la fourrure avec des brins de laine repris dans la toile. La coupe est identique à celle des peaux de bête. Des bandes sont cousues pour rallonger le vêtement.

Le tissage à la gauloise

Age du Fer (800-900 av. J.C.)

Les Celtes arrivent des plateaux anatoliens avec leurs moutons blancs. Ils colorent leur laine avec des teintes vives. Ils utilisent le sergé plus souple et plus solide avec une grande finesse du tissu (20 fils au cm). Le métier à tisser est transformé pour réaliser ce sergé. Le vêtement comporte une tunique et des braies. Pour la fabrication d’une tunique, il faut compter 4 semaines sans compter la réalisation du fil (qui lui prend environ deux mois). Le tissu est donc un article très onéreux : s'il est déchiré, on rapièce !

Le tissage à la gauloise

Le style des tissus celtes, avec des losanges brisés, rappelle beaucoup les tissus écossais. Les Ecossais, qui n'ont jamais été envahis par les Romains, ont gardé la mode celte ! A noter également que les Celtes connaissaient et utilisaient les fils métalliques (argent) pour les articles de luxe.

Le tissage à la gauloiseLe tissage à la gauloise

Pompéi

Un atelier de teinture a été retrouvé dans la ville de Pompéi. Au niveau de la rue, il comportait une grande cuve (900l) étanchée avec des plaques de plomb, probablement une cuve à alun. Dans la cour, plusieurs bacs à teinture pouvant être chauffés, sans doute un bac par couleur, ainsi qu'un bac conique pouvant convenir à une fermentation, ce qui est important pour la réalisation du bleu

Le tissage à la gauloise

Marie-Pierre Puybarré a fait revivre cette installation ;  à noter la toxicité de ce lieu avec la présence de plomb constamment chauffé.

Après ce brillant exposé et quelques questions au cours desquelles on apprend que tricot et feutre apparaissent beaucoup plus tardivement que le tissage malgré la simplicité des techniques, on passe aux démonstrations. Marie-Pierre nous présente son métier à tisser.

Le tissage à la gauloise

Il sera utilisé avec les enfants de la maternelle dans le cadre du programme « La classe, l'œuvre » et les réalisations des enfants seront exposées à partir du 18 mai lors de la nuit européenne des musées. C'est une date à retenir, les œuvres présentées les années précédentes étaient vraiment étonnantes !

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article