Châteaumeillant : 2200 ans d’histoire
Pour la dernière visite guidée de Châteaumeillant, le rendez-vous était sur la place de la mairie, ce vendredi 23 aout. Et puisque nous arrivons un peu en avance et que le musée des vieux métiers a ouvert ses portes, nous en avons profité pour une petite visite.
Ici sont rassemblés des objets majoritairement du 19ème siècle représentant les activités artisanales et agricoles de notre région. La pièce maitresse est cet énorme pressoir, datant probablement du moyen-âge, avec une poutre centrale qui ne pèse pas moins de 2.8 tonnes.
A l’heure dite, Chantal nous reçoit sur la place de la mairie, devant le monument aux morts, œuvre de Popineau, représentant une berrichonne qui se recueille. Il va être prochainement restauré.
Pour ce tour de ville, nous sommes un peu plus d’une trentaine.
Le site de Châteaumeillant est occupé en permanence depuis plus de 2200 ans. Les premières traces d’occupation remontent à environ -200 av. JC. Une riche métropole gauloise puis gallo-romaine s’est installée sur cet oppidum entre Sinaise et Goutte Noire. Les fouilles archéologiques ont mis à jour des trésors qui sont conservés au musée Emile Chénon. Nous en reparlerons plus longuement à la fin de la visite, au musée.
Au moyen-âge, la ville s’organise autour d’un castrum. La superficie de la cité s’est considérablement réduite par rapport à l’oppidum gallo-romain.
D'après A. Chazelle, N. De Buhren "Le canton de Châteaumeillant" - et avec l'aide du musée Emile Chénon
La ville moderne s’est construite sur la ville antique mais une partie de la ville antique, au sud, est restée inoccupée. C’est dans cette zone vierge de toute nouvelle occupation qu’ont été découvert la plupart des trésors présentés au musée !
Sur le castrum où nous nous trouvons, le « Chapitre » Notre Dame la petite a été édifiée fin 11ème début 12ème siècle. C’est la chapelle du château (elle a été édifiée à la même période que l’église paroissiale St Genest). Charles d’Albret y fonde un collège de chanoine en 1517 et installe sa chapelle seigneuriale dans un bras du transept (en modifiant sans doute considérablement l’architecture initiale).
Cet édifice a belle allure avec ses absidioles décorées de modillons sculptés, cordon de billettes et arcades aveugles séparés de colonnettes et de pilastres décorés. Le clocher aurait comporté deux étages, l’un a été supprimé à la Révolution. Ce Chapitre a connu bien des vicissitudes à la Révolution : abandonné, transformé en prison, en marché couvert …
Entrons à l’intérieur du Chapitre. Il accueille actuellement une exposition artistique pour tout l’été. Nous nous retrouvons dans ce qui fut la chapelle des seigneurs de Châteaumeillant. Aux écussons originaux des d’Albret se sont substitués ceux des Fradet, propriétaires de la seigneurie de Châteaumeillant en 1644 et qui érigent la châtellenie en comté. Les Fradet sont alliés aux Lusignan dont les armes sont au côté de ceux des Fradet.
Alors Chantal nous raconte l’histoire de la fée Mélusine dont se réclament les Lusignan.
Condamnée à être chaque samedi mi-serpent mi femme, Mélusine pourrait redevenir une femme normale si son mari tenait sa promesse de ne pas la voir ce jour là. Mélusine épouse Raymondin, qui amoureux, promet tout ce qu’on lui demande. Mais cédant aux insinuations de son frère, un samedi, Raymondin fait une ouverture dans la chambre de sa femme. Il l’aperçoit alors dans la baignoire, peignant ses cheveux. Jusqu’au nombril, elle avait figure humaine, plus bas, elle ressemblait à un serpent. Surprise, la promesse rompue, Mélusine s’envola par la fenêtre et fut transformée en dragon. Elle apparait pour annoncer la mort des siens trois jours à l’avance …
Une statue de la fée Mélusine en plomb recouvert d’or fut érigée en haut du château. Alors nous y allons !
Le château date des 12ème au 15ème siècle ; il domine la Sinaise. Très restauré, il est actuellement occupé par la Gendarmerie. Le pavillon d’entrée présente les rainures verticales où se relevaient les barres de manœuvre du pont-levis. Les douves ont été comblées. Il reste une tour ronde qui se trouve à l’angle sud-est. Le donjon, que surmontait la fée Mélusine a été détruit en 1793 et la statue fondue pour récupérer le métal. Le château fut alors déclaré carrière publique !
Ce n’est pas le premier château de Châteaumeillant : une motte castrale a été édifiée vers le 10ème siècle, on en aperçoit le sommet au dessus du jardin du musée. La motte était surmontée d’un donjon en pierre. Cet édifice est abandonné en 1152 après l’incendie de la ville par Louis VII, au profit du nouveau château.
L’hôtel qui abrite le musée, dit « Petit château » ou hôtel Marcillac est des 14ème et 15ème siècles. Il comporte de belles solives peintes que nous aurons l’occasion de voir en visitant le musée.
A part ces édifices, il existe peu de vestiges du moyen-âge dans la ville, la très grande majorité des bâtiments date du 19ème siècle.
L’église paroissiale a été édifiée en dehors de la ville médiévale sur un site correspondant à un ancien édifice religieux ; peut-être le lieu du martyr de St Genest, soldat romain exécuté car il refusait de martyriser les chrétiens. Cet édifice imposant est des 11ème -12ème siècles, il date de la même époque que ND la Petite.
L’église comporte trois travées ; 7 absides ouvrent sur le transept. Le porche en plein cintre est entouré de 2 niches dans lesquelles étaient, selon la tradition, la statue d’un seigneur et de sa femme ; au-dessus, le tympan losangé était sans doute décoré de mosaïques. Les linteaux comportent des pierres à entrelacs similaires à ceux rencontrés au chapitre, les colonnes sont surmontées de sculptures d’animaux fantastiques.
Le clocher n’est pas d’époque : c’est le cinquième clocher qui couronne cette église. A l’origine, le clocher se situait à la croisée du transept. Ce dernier clocher date du 19ème siècle, il représente le style de l’époque pour lequel la hauteur est un critère majeur.
Sur la face sud, on trouve des sculptures « assez peu catholiques » avant d’arriver à la magnifique porte sud, sans doute de la première période, avec les bandeaux chevronnés et des étoiles à 4 pointes.
Entrant dans l’église, on remarque en premier les dimensions imposantes de l’édifice et en avançant vers le transept se découvre la forêt de colonnes. La plupart des chapiteaux sont sculptés, certains sur les 4 faces. Le thème général des sculptures est la lutte du bien contre le mal.
Sur le transept, des peintures en noir, ce sont des litres funéraires, bandes noires posées à l’intérieur de l’église pour rendre hommage à un défunt. Parmi celles-ci on remarque une évocation de la fée Mélusine, hommage aux Lusignan ! Et à côté, les vitraux de Jean Mauret.
Arrivés au musée Emile Chénon, nous sommes accueillis par Régine qui nous présente le musée ; on y retrouve les grands précurseurs des fouilles à Châteaumeillant : Emile Chénon, Emile Hugoniot et Jacques Gourvest.
Les premières vedettes du musée ce sont les amphores : Châteaumeillant est le site terrestre où ont été retrouvées le plus d’amphores ! Une cave à amphores est reconstituée.
Après un passionnant historique des fouilles présentés en vidéo par Sophie Krausz, Responsable des fouilles archéologiques de 2011 à 2018, Régine évoquera la première phase de peuplement de Châteaumeillant : de la ville ouverte de -200 avant JC, au mur gaulois à 100 av JC et aux évènements à Châteaumeillant durant la guerre des Gaules avec la construction du rempart massif.
Une brève visite du musée (l’heure tourne) nous permet de découvrir la vie et l’artisanat gaulois mais aussi l’art de la sculpture gauloise avec quelques pièces rares.
Puis nous passons à la période gallo-romaine avec en particulier le trésor découvert en 2012 et qui a justifié la rénovation complète du musée.
En sortant du musée nous sommes accueillis par deux producteurs locaux : Michel Nigrette producteur de vin de Châteaumeillant et Vincent Le Borgne producteur de fromages de chèvre.
En dégustant, ils nous parlent de leur travail : sur ses 3.5ha de vigne, Michel a obtenu une très belle récolte 2018 par contre l’année 2019 sera plus difficile avec des gelées tardives au printemps et la canicule estivale qui a bloqué la maturation des raisins.
Vincent Le Borgne avec ses 80 chèvres est autonome au niveau du fourrage et céréales avec une production quasi-bio. Sa production de fromage de chèvre est vendue en direct en particulier sur les marchés de Châteaumeillant, La Châtre et Bourges.
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