Su’l’ Pavé : Ghislaine Gautron avec Jehan-Rictus au Pôle de l’étang Merlin à Châteaumeillant
Ce 8 octobre au Pôle de l’Etang Merlin, Jehan-Rictus par ses textes, nous a emmené dans le Paris populaire des années 1900 en nous racontant d’abord l’histoire de ce Pauv’Julien.
C’était vraiment un bon gas, il avait le cœur sur la main. Il était matelassier, alors bien sûr, il faut faire glisser la poussière, c’était peut-être là son seul défaut ! Par contre sa « duchesse », elle lui en a t’y fait voir, mais malgré tout ça il l’aimait bien. Il était amoureux, quoi, mais il était jaloux ! C’est ça qu’est la cause du drame, comme nous le raconte Violette. Elle vit dans la rue, alors elle sait tout. Cette histoire s’est passée en 1900, mais ça peut arriver aussi bien aujourd’hui, les sentiments sont intemporels.
Violette, c’est Ghislaine Gautron qui lui donne vie. Avec empathie, elle nous fait passer avec intensité toutes ses émotions, passant brusquement de la tendresse à la colère, comme surgissent les sentiments ; et toujours elle suscite le sourire avec son parler argotique parisien tout en s’appuyant largement sur la bouteille.
Juste le temps d’un petit casse-croute, la gamelle sur la valise (mais quand même avec une serviette blanche !) et Violette (Ghislaine) repart sur une autre histoire qui lui est arrivée, une histoire de revenant, mais quel revenant !
Un jour, elle maugréait contre l’Eglise (pas contre la religion, contre l’Eglise.) : « Ah s’il revenait, le trimardeur galiléen, celui qui se fit accrocher à 33 ans, celui qui sur sa dorsale a porté une autre croix que la Légion d’honneur. Devant cette figure d’honnête homme que diraient nos négociants ? Et c’est le pape qui serait bien affolé, lui qu’est plus riche que Crésus ! ». Et puis voilà t’y pas, qu’au coin d’une rue, elle l’a rencontré, incognito !
Par cette violente diatribe contre l’Eglise et les dérives qu’elle a subie, Jehan-Rictus apparait, par contraste, comme un grand écrivain chrétien de son temps. Violette (Ghislaine Gautron) exprime ici toute sa solidarité « de classe » avec Jésus et sa colère contre les riches et les puissants.
Dans ce spectacle de plus d’une heure seule en scène, Ghislaine Gautron nous a éblouis : elle tient constamment son public en haleine, elle est cette clocharde un peu portée sur la bouteille mais solide dans sa tête et lucide. Elle vous parle, à vous, personnellement, au milieu du public. Impressionnant ! Et puis plus d’une heure de spectacle seule, en scène, ça demande une sacrée capacité de mémorisation. Bravo.
Mise en scène : Pascal Le Fur