Deux journées de randonnée dans les Pas des Maitres Sonneurs au départ d’Huriel

Cette année le Pays d’Huriel consacre sa saison estivale à George Sand : « La plume et le chemin », il  était donc naturel que l’association « Sur les pas des Maitres Sonneurs » participe à l’évènement en y organisant sa randonnée culturelle annuelle de deux jours.

C’est ainsi que le samedi 6 juillet, après un orage impressionnant nous sous sommes retrouvés une bonne quarantaine de randonneurs sous la halle d’Huriel … attendant que la pluie cesse !

Mr Bernard Duplaix, historien local et adjoint au maire en profite pour nous présenter sa cité, riche d’histoire avec ses deux édifices majeurs : l’église ND, ancienne église prieurale du 12^ème siècle et le château fort de la même époque dont subsiste le célèbre donjon carré bien restauré : la Toque. Puis c’est à Mr J.E. Chabrol, Président de la communauté de communes de prendre la parole.

Huriel était aussi un pays de vigne : jusqu’à 1200ha avant le phylloxéra. Ce vignoble disparaitra avec la guerre de 14 faute de main d’œuvre pour l’exploiter. Ensuite le développement de Montluçon tout proche a conduit Huriel à être une cité résidentielle qui compte actuellement 2600 habitants et comporte tous les commerces et services de première nécessité.

La pluie ayant cessé (momentanément), la petite troupe s’élance, cornemuse en tête. Nous suivons le sentier balisé des Maitres Sonneurs. Après la traversée de la Magieure et quelques bonnes côtes, le sentier, parfois bien boueux, nous conduit à La Brande des Mottes.

Là est le premier ravitaillement, comme toujours somptueux lors de ces randonnées, mais c’est là aussi que nous retrouvons Bernard Duplaix pour nous raconter l’histoire du soulèvement de La Brande des Mottes.

Et l’histoire de la Brande des Mottes commence à Paris ! Le 13 juin 1849 à l’Assemblée Nationale, Ledru Rollin s’oppose violemment au gouvernement qui souhaite envoyer une expédition militaire à Rome pour soutenir le Pape face à la jeune République romaine. Un appel aux armes est lancé. Cet appel est relayé ici par Fargin Fayolle, un bourgeois républicain localement très estimé. A son appel huit cents paysans, sommairement armés,  se rassemblent à la Brande des Mottes avec pour but de marcher sur Montluçon. Pendant ce temps, à Paris l’émeute est réprimée et la manifestation tourne court ; à Montluçon, les forces de l’ordre sont sur le pied de guerre. Fargin Fayolle comprend alors son échec et demande aux hommes de rentrer chez eux : pas facile car certains commencent à être avinés ! Quelques exactions sont commises. Lors du procès qui suivra, Fargin Fayolle sera condamné à 5 ans de prison, 48 personnes (qui ont commis des exactions) seront condamnées, les autres seront acquittées.

Et la randonnée repart vaillamment sous une petite pluie persistante. A la traversée de la Mauzelle, nous passons, sans nous en rendre compte, à Nocq. Nocq était l’ancienne commune, isolée sur son plateau. Et puis, au croisement de deux routes, une foire s’est installée à Chambérat. Chambérat a prospéré et Nocq a périclité, maintenant il ne reste plus rien à Nocq, même l’église a disparu.

Suivant toujours le sentier des Maitres Sonneurs nous arrivons au « Pas de l’âne ». Ce lieu-dit évoque le passage de saint Martin, sur son âne. Saint Martin a ici une double réputation : de générosité avec le partage de son manteau mais aussi de pourfendeur des symboles religieux non chrétiens et de destruction des mégalithes, et cela, c’est moins bien apprécié localement.

Et après une douzaine de km un peu pénible mais sous le soleil retrouvé nous arrivons à Chambérat pour le déjeuner sous le préau de l’école alors que Mic s’essaie sur une cornemuse rustique en vessie de veau.

Après le repas, le départ se fait toujours au son de la cornemuse de Mic pour rejoindre le sentier des Maitres Sonneurs et atteindre Laleuf.  Le bois de l’alleu (aujourd’hui Laleuf) est un haut lieu du roman de George Sand : c’est ici que Joset, l’apprenti musicien berrichon, s’initie à la façon bourbonnaise de jouer de la cornemuse. C’est donc d’ici qu’il tirera son génie musical.

Nous nous engageons en direction du château de Laleuf. Le château actuel date du 15^ème siècle et possédait à l’époque sept métairies. Il est aujourd’hui la propriété de la famille Landreau. Pierre Landreau a porté haut l’hommage au roman des Maîtres Sonneurs et à la cornemuse. En son souvenir Mesdames Landreau ont souhaité accueillir la randonnée des Maitres Sonneurs qui passait près de chez elles.

Elles nous ont reçus magnifiquement dans leur propriété, nous offrant café et gâteaux. Mic leur a improvisé un mini concert et offert un exemplaire de la Bouinotte avec un grand article sur les Maitres Sonneurs avant de se recueillir en musique et Georges au chant (un magnifique hymne à la Vierge) dans la chapelle dédiée à Pierre : beaucoup d’émotion !

Il nous faut quitter ce lieu idyllique pour reprendre notre route vers Mesples où, après un nouveau ravitaillement, nous sommes reçus très gentiment par Mr le Maire, tandis que Mic nous lit le passage du roman de George Sand où il est question de Mesples. Mesples possède deux moulins sur l’Arnon : le moulin du Vert, du 12^ème siècle où, sur la digue du moulin, l’Arnon change de direction pour se diriger vers le nord, et le moulin de La Vie (joli site où nous passerons).

Et c’est reparti. Il reste encore 6km, pas toujours faciles, pour rejoindre St Palais, l’arrivée de cette première journée de randonnée sur les pas des Maîtres Sonneurs.

A Saint Palais, en plus de l’en-cas d’arrivée, nous attend une superbe exposition organisée par le Pays d’Huriel « Au cœur des Maîtres-Sonneurs », avec 16 panneaux très bien faits retraçant le roman, son contexte économique, géographique et musical. Cette exposition circulera tout l’été dans les communes du pays d’Huriel.

Nous nous retrouvons le lendemain, 7 juillet.

Cette deuxième journée de randonnée dans les pas des Maîtres Sonneurs se présente sous de bien meilleurs auspices météorologiques avec le soleil revenu. Nous nous retrouvons, comme la veille, sous la halle d’Huriel, et avec le même cérémonial : après un petit café et les consignes de sécurité, c’est le départ sous la conduite de la cornemuse de Mic.

Le premier arrêt a lieu au hameau de Ménitroux pour notre premier ravitaillement, mais Ménitroux, c’est là qu’est né Jean Chassagne, dit « le maréchal de la Pérelle » car il était aussi maréchal ferrant, ainsi que nous le raconte Mic. Ce « maréchal de la Pérelle »  s’intitulait lui-même « le plus grand joueur de cornemuse de l’univers » ! Il raconte qu’il a appris la cornemuse contre l’avis de ses parents (le cornemuseux était alors plus ou moins assimilé à un sorcier) en fabriquant un instrument avec une vessie de porc et du sureau. Son oncle le sauve en lui achetant une vraie cornemuse et il développe tant son art qu’il obtient la médaille d’or lors de l’exposition universelle de Paris en 1889.

Et c’est reparti jusqu’à Archignat. La randonnée aurait dû traverser la voie ferrée  sous un tunnel dans un joli paysage, visiblement ce n’est pas l’itinéraire qu’ont pris les randonneurs ! Mais ce petit raccourcit est peut-être le bienvenu car l’étape est longue. Néanmoins tout le monde est bien arrivé à l’étang d’Archingnat, très agréable endroit où est installé le ravitaillement.

Monsieur le Maire nous présente sa commune de 350 habitants avec une belle église du 12^ème siècle (privée) dans le joli village de Frontenat. Mais Archignat dans les Maitres Sonneurs, c’est Maitre Archignat, le nom du chef des muletiers, des hommes rudes  chargés du transport du bois et du minerais pour les forges (un muletier et son aide pour 24 mulets, souvent du Poitou, nous indique Mic). Ils sont impliqués dans de nombreux combats au bâton et pour eux, une vie humaine ne vaut pas cher !

Et c’est reparti pour une étape d‘encore 8km pour rejoindre l’étang d’Herculat, mais les chemins sont bons. L’arrivée à l’étang d’Herculat par la digue est la bienvenue. C’est au camping que se termine la randonnée proprement dite, près de 17km quand même pour cette matinée.

Maintenant c’est l’heure de la détente avec le repas dans le cadre  très agréable du camping. Monsieur le Maire vient nous saluer et nous parler de sa commune, à la frontière entre langue d’oc et langue d’oïl, avec le site remarquable d’Herculat, un plan d’eau de 18ha dans lequel a été aménagé un bassin biologique qui permet la baignade dans une eau pure filtrée par des plantes et des bactéries dans le lagunage adjacent.

Pour terminer agréablement ces deux jours de randonnée dans les pas des Maîtres Sonneurs, Emmanuel Monnet et Nicolas Galleazzi nous offre un concert. Emmanuel Monnet est professeur de vielle au Conservatoire de Montluçon, Nicolas Galleazzi est facteur de cornemuse à Clermont-Ferrand et cornemuseux lui-même.

Ensemble ils nous interprètent bourrées à deux temps, valses … tout se qu’il faut pour que nos randonneurs se dégourdissent les jambes une dernière fois ! Et puis ils entonnent des chansons pour que tout le monde les reprennent ensemble.

Voilà deux belles journées de très riches randonnées culturelles qui se terminent car il faut maintenant un peu se dépêcher : en ce dimanche 7 juillet, il faut aller voter !