Agir contre la désertification médicale

Publié le par nous-en-boischaut-sud

La médecine en milieu rural était au programme du ciné-club de Sidiailles ce 18 mars. Voilà un thème très critique dans notre région, au milieu de la diagonale du vide, en plein cœur du désert médical français. La salle de proximité de la mairie de Sidiailles était bien petite pour accueillir tous les participants à cette nouvelle séance du ciné-club.

La première partie était consacrée à un documentaire de « Médecins Solidaires » qui décrit l’action originale et pionnière de cette association pour lutter contre les déserts médicaux. Le principe : « Au lieu de demander beaucoup à peu de médecins, demandons peu à beaucoup de médecins ».

Il est vrai que l’installation permanente d’un médecin dans nos zones rurales se heurte à plusieurs difficultés : un sentiment d’isolement (peu de confrères proches, pas de spécialistes…), une charge de travail importante,  la difficulté pour le conjoint de trouver une activité adaptée… Notre région souffre aussi de l’absence d’une faculté de médecine proche, fixant dans notre secteur les étudiants en médecine (un projet est en  cours à Bourges). Il est donc compréhensible que des médecins soient réticents à s’installer de façon durable près de chez nous.

Face à cette situation dramatique « Médecins Solidaires » incite à se prendre en main et faire preuve d’imagination pour agir. Une idée innovante a émergé.

De nombreux médecins seraient prêts à donner un peu de leur temps, par exemple une semaine par an, pour apporter un accès aux soins dans des villages souffrant cruellement de pénurie médicale. Pour eux, cette action est gratifiante et redonne un sens à leur vocation médicale qui est de « servir » et d’apporter une aide à la population. La logistique (logement, transport, administratif…) est prise en charge par l’association. Le retour des premiers médecins ayant tenté cette expérience est très positif.

La France compte environ 100.000 médecins généralistes, si 10% d’entre eux acceptaient de donner une semaine par an de leur temps cela permettrait de créer 200 centres de santé avec un médecin en permanence. Actuellement le collectif, qui n’a été créé qu’en 2022, compte déjà 600 médecins et huit centres de soin ont été créés dans des zones rurales (Creuse, Indre, Cher, Nièvre, Deux Sèvres, Haute Vienne, Lot et Garonne). D’autres centres pourraient être créés si un collectif motivé se mettait en place localement.

Le film montre la mise en place d’un centre de soin de « Médecin Solidaires » à Ajain (23).

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De son côté, Myriam Lourteau, infirmière et auteur du livre « Infirmière tout terrain » vient témoigner de son expérience en libéral[1]. Elle témoigne de la charge de travail et de l’exercice solitaire du métier (même en travaillant en association avec d’autres infirmières) mais elle met en avant également tout le côté humain qu’il recèle (soigner c’est créé du lien). La présence rassurante d’un soignant à côté du malade est déjà un acte thérapeutique, ainsi elle est sceptique sur l’intérêt de la téléconsultation avec son absence de contact humain.

 

[1] Le Dr Henri Lafranque n’a pas pu participer à cette séance à cause de sévères contraintes familiales

Agir contre la désertification médicale

Le « grand » film de la soirée est « Médecin de campagne » tourné en 2016 par Thomas Lilti (qui en plus d’être cinéaste est également médecin) avec dans les rôles principaux François Cluzet et Marianne Denicourt.

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Ce film est globalement très réaliste, bien qu’il montre beaucoup de visites à domicile alors qu’elles ont disparu dans nos campagnes.  Il montre bien la complexité du métier avec la grande responsabilité qu’il implique. Pour le médecin la dose d’empathie à accorder au malade est toujours difficile à apprécier : il s’agit de trouver la bonne limite. Mais le film montre aussi les freins à l’évolution de cette profession, comme cette mentalité de libéral, indépendant qui accepte difficilement de déléguer ou partager.

Myriam Lourtau dégage également d’autres pistes qui, à son niveau, pourraient améliorer l’offre de soin en milieu rural telles que le développement des infirmières en pratiques avancées qui peuvent suppléer le médecin pour certaines tâches ou encore la possibilité pour les infirmières de délivrer des ordonnances pour des domaines relevant de leur compétence.

Elle juge positivement le développement des cabinets médicaux itinérants.

Agir contre la désertification médicale

Les déserts médicaux en France ne sont pas une fatalité, il n’y a pas de crise de vocations en France. Le numerus-clausus a été supprimé, il s’agit maintenant de développer les structures de formation et de prévoir un financement pour la rémunération des futurs médecins. En attendant une « incitation forte » à une meilleure répartition de la population médicale sur le territoire serait la bienvenue.

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B
"Mais le film montre aussi les freins à l’évolution de cette profession, comme cette mentalité de libéral, indépendant qui accepte difficilement de déléguer ou partager". <br /> Dans cette phrase relevée dans le commentaire, un gros problème est résumé, et il ne se limite pas uniquement à la profession mais aussi à tous les acteurs, à commencer par les politiques. A quand une véritable ORGANISATION du territoire et non pas AMENAGEMENT, mot magique derrière lequel on cache toute son hypocrisie...
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N
Merci Guy pour ce commentaire issu d'une longue expérience de terrain.