L’atelier du parcheminier à Levroux
A l’occasion d’une sortie avec l’association Châteaumeillant Nature, entre une visite du château de Bouges et une visite de la cité de Levroux, nous avons eu l’occasion de visiter sans doute l’un des derniers ateliers de parcheminier de la région, à Levroux, celui de Jean-Charles Bavouzet.
Jean-Charles Bavouzet nous reçoit dans son atelier. Son père était parcheminier, son grand-père était parcheminier, il leur a succédé dans l’atelier où il perpétue maintenant la tradition familiale à Levroux. Il a cependant une autre activité : la musique, en temps que contrebassiste notamment au sein du groupe Am Ketenes.
Au milieu de la champagne berrichonne qui autrefois était parcourue de troupeaux de moutons, dans une région où les eaux sont très calcaires, Levroux a une vraie tradition de travail des peaux. Il y avait encore une trentaine de mégisseries dans les années 1960, il n’en reste que deux et il est le seul parcheminier.
Le début de l’utilisation du parchemin est daté du 2ème siècle av. JC à Pergame. Il s’agissait alors de répondre à un embargo égyptien sur le papyrus.
Le parchemin connait son heure de gloire au moyen-âge avant d’être remplacé par le papier, à partir du 12ème siècle, pour l’écriture. Au moyen-âge également, le parchemin a été utilisé en remplacement des vitres ; pour cela le parchemin était moins étiré de façon à rester translucide.
Mais il existe d’autres utilisations du parchemin, certaines ne nécessitent que des parchemins de qualité moyenne (pour couvrir les pots de confiture ou pour des étiquettes par exemple). Dans les années 1960, le parchemin a été remplacé par le plastique pour ces applications. D’autres applications sont beaucoup plus techniques : reliure, valise, revêtement de table… et relèvent du domaine de l’art ou du luxe. Ces applications perdurent. Ainsi la maison Bodin-Joyeux de Levroux livre 60 000 peaux par an à Chanel !
La principale qualité du parchemin est sa grande résistance mécanique obtenue grâce à l’orientation de toutes les fibres de la peau. A cause de cela, le parchemin est également un matériau à mémoire de forme. Le parchemin peut même résister à des incendies !
Mais comment fabrique-t-on un parchemin ? Jean-Charles nous montre.
Tous les types de peaux peuvent être utilisés mais les plus courantes sont les peaux de mouton et de chèvre ; la démonstration se fera sur une peau de chèvre.
Les premières étapes sont identiques à celles de la préparation du cuir, mais ensuite la peau ne subit pas les traitements agressifs du tannage. La peau est mise à gonfler dans un bain de chaux. La laine peut être épilée mécaniquement, puis la graisse résiduelle est éliminée également mécaniquement en raclant la peau.
Ensuite la peau est tendue sur un cadre. Les parchemins d’art sont tendus avec des ficelles, les parchemins de 2ème catégorie sont plutôt tendus sur des ovales. C’est à ce stade que la peau commence à être étirée pour aligner les fibres et donner sa solidité au parchemin.
Alors commence le travail d’écharnage et d’essorage côté interne et le travail de lissage côté externe de la peau pour repousser les bulbes des poils et rendre la peau le plus lisse possible. Et vient encore un étirage avant le séchage !
Tout ce travail est très technique et très physique. Lorsque la peau est prête, toute la vie de l’animal apparait : on peut voir, ici la trace de la vaccination, là les piqures d’insectes, on peut même voir si l’animal a été trop abondamment nourri, sous la peau apparaissent alors les traces des veines !
Là encore nous aurions pu rester longtemps à écouter Jean-Charles Bavouzet, mais chacun a ses obligations.